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Benoît Aymonier

Comment se libérer de la manipulation ?


Qui n’aspire pas à vivre en se sentant totalement libre de pouvoir exprimer et manifester ce qu’il est profondément (son Être essentiel) ? A pouvoir vivre sa vie dans toute son authenticité, sans peur, ni honte, ni culpabilité ? Se positionner en alignement avec son Être essentiel, c’est être en totale transparence, libéré de tous masques ou boucliers. C’est montrer et communiquer au monde ce que l’on est, y compris dans ses zones les plus sensibles et vulnérables. C’est ce que j’appelle « ouvrir son cœur aux autres ». Une objection m’a souvent été exprimée par rapport à des personnes qui ont tendance à les manipuler et qui pourraient utiliser leur ouverture de cœur pour tirer avantage de leurs vulnérabilités. Je suis par ailleurs souvent confronté à des problématiques de manipulation dans les mandats de coaching que l’on me confit. Comment concilier l’aspiration à l’authenticité et le besoin de sécurité dans nos relations interpersonnelles avec des “manipulateurs” ?

Avant tout, il convient de préciser que la manipulation n’est ni bonne ni mauvaise en soi et que toute relation interpersonnelle peut, dans un sens très large, être qualifiée de manipulation : un vendeur et un acheteur, un professeur et un étudiant, un parent et un enfant, un acteur et son public, un homme politique et ses électeurs, un chiropracteur et un patient, un escroc et un pigeon …

On peut schématiser les interactions de la façon suivante :

Deuxième notion importante qu’il convient de souligner : il n’y a pas de manipulateurs sans manipulés. C’est une danse qui se pratique au minimum à deux personnes. Pour quelles raisons un manipulateur essaye-t-il de manipuler, à savoir agir de façon directe ou indirecte en vue de contrôler ou de faire changer les autres ? À moins que ce ne soit à l’initiative même de la personne manipulée qui demande de l’aide pour changer et transformer quelque chose en elle, c’est dans 100% des cas motivé par un mécanisme de protection, conscient ou inconscient, de la part du manipulateur qui cherche à agir sur les autres pour retrouver son confort et sa sécurité. Par ailleurs, une manipulation n’est possible que s’il y a une prise. Et sur quoi s’appuient les manipulateurs pour arriver à leurs fins ? Sur ce qui constitue des prises de manipulation, à savoir les peurs, les blessures, les faiblesses et les protections de ceux qu’ils cherchent à manipuler. Par exemple, une manipulation qui s’appuie sur la peur ou la culpabilité ne peut fonctionner que si la personne manipulée se croit en danger ou se sent coupable.

Prenons un exemple vivant pour illustrer cela : Françoise s’est construite avec une blessure d’humiliation dans son enfance. Très sensible aux critiques, elle est très vite déstabilisée, ce qui affecte sa confiance en elle. Aussi, pour éviter de revivre toute situation potentielle dans laquelle elle pourrait être jugée et dépréciée par les autres, elle est devenue perfectionniste dans son travail et obtient de très bons résultats. Elle n’en est pas moins facilement touchée et stressée dès qu’un supérieur hiérarchique ou un collègue semble critiquer de près ou de loin sa façon de faire ou ses réalisations. Depuis quelques semaines, Françoise a un nouveau travail. Si son patron semble satisfait des efforts qu’elle fournit, il en va tout autrement pour son collègue, Cédric, qui voit l’arrivée de cette nouvelle recrue comme une menace potentielle, susceptible de lui faire de l’ombre. Cédric est calculateur, stratégique, il ne se sent en sécurité que lorsqu’il atteint ses objectifs professionnels qui signifient pour lui avoir un maximum d’influence auprès de la direction, gagner en responsabilité, élargir son réseau et briller par ses résultats. Célibataire, mener à bien sa carrière est pour lui une priorité dans la vie car c’est le moyen le plus sûr qu’il a trouvé pour s’épanouir et trouver sa place dans le monde. Il se sent menacé par la compétence et les bons résultats de Françoise. Il saisit donc chaque occasion pour la déstabiliser dans l’espoir qu’elle soit moins brillante et efficace dans son travail, et réduire ainsi le risque de voir son évolution de carrière ralenti par elle. Dans la boîte depuis une dizaine d’années, il entretient de bons rapports professionnels avec les différentes équipes et fait subtilement un travail de sape afin d’entamer l’image de Françoise auprès de tous. Très rapidement après son arrivée, Françoise ressent, sans en comprendre les raisons, un léger malaise avec certaines personnes qui semblent la fuir et la regarder bizarrement. Cédric, son collègue direct, peut se montrer aussi chaleureux que glacial. Elle ne sait pas sur quel pied danser, se sent mal à l’aise, et adopte finalement une position de réserve, voire de fermeture. Françoise se sent de plus en plus isolée et vit de plus en plus mal les situations ambiguës avec Cédric. Elle n’en est pas moins efficace dans son travail et obtient de beaux succès, ce qui attise les inquiétudes de Cédric qui cherche à consolider sa place en essayant de prendre l’ascendant sur Françoise. Il devient condescendant à son égard et n’hésite pas à la critiquer publiquement en réunion. Françoise encaisse les coups sans pouvoir réagir car elle perd tous ses moyens dans de telles situations. C’est désormais avec la boule au ventre qu’elle part au travail tous les matins. Elle n’a plus de plaisir à travailler et commence à se demander si ce métier est fait pour elle. Après quelques mois à vivre cet enfer, n’en pouvant plus, elle démissionne. Dans cet exemple, si Cédric obtient ce qu’il veut en manipulant les uns et les autres – écarter le danger, sécuriser sa place et son évolution de carrière –, c’est parce que Françoise n’a pas été en mesure de se positionner sans être parasitée par ses propres protections. Pour survivre, elle s’est enfuie. Son départ est dû au stress déclenché par les manipulations de Cédric, ravivant et générant des souffrances d’enfance devenues insupportables pour elle. Les mécanismes de protection de Cédric – prendre le dessus, contrôler, envahir l’espace des autres – ont fonctionné grâce aux mécanismes de protection de Françoise – prendre sur soi, encaisser et fuir quand cela devient trop douloureux. En quittant l’entreprise, Françoise emporte ses blessures avec elle et a toutes les chances de se retrouver dans des situations similaires dans les prochains postes qu’elle occupera. Le défi de Françoise aujourd’hui, pour ne pas reproduire de tels épisodes douloureux dans sa vie, c’est de guérir de sa blessure d’humiliation, et ainsi de ne plus laisser de prise à ce type de manipulation. Il lui faudra, dans ce processus de guérison, ouvrir son cœur, tout d’abord à elle-même pour mettre en lumière ce qu’elle a essayé de cacher pendant des années, puis aux autres, y compris à ceux qui ont contribué à ses blessures. En tout état de cause, il appartient à Françoise de faire de son mieux pour se positionner en étant toujours plus alignée à son essence, de se guérir de ses blessures et de se libérer de ses protections, sans quoi elle restera impuissante et incapable de faire face à des manipulateurs comme Cédric. Ainsi, quand un manipulateur parvient à ses fins, le problème ne réside pas tant dans le fait qu’il est manipulateur, que dans le fait que les personnes qu’il manipule rendent ses manigances possibles. Si, face à des personnes manipulatrices, nos protections s’activent et nous font adopter un positionnement sécuritaire, nous nous mettons paradoxalement en position de faiblesse car nous leur offrons une prise pour nous manipuler. Alors que le fait d’être aligné à soi et de pouvoir exprimer son désaccord réduit l’emprise du manipulateur sur nous, mais en plus, si nous arrivons à nous défaire de nos protections, peut le désarmer totalement. Ouvrir son cœur parce qu’on est ce qu’on est, que l’expérience du moment nous permet de le mettre en lumière, que nous exprimons et partageons simplement ce que nous sommes en train de vivre ici et maintenant, ne donne a priori aucun levier de manipulation aux autres. Il convient cependant d’ouvrir son cœur pour soi, pour respecter ce que l’on Est, sans y ajouter de conditions pour se sécuriser, de limites ou de volonté d’obtenir certains résultats précis. Auxquels cas, notre ouverture de cœur ne serait que partielle car nos peurs, nos conditionnements et notre mental analytique auraient réussi à s’immiscer et à nous parasiter. Et là commence une danse avec nous-mêmes, entre privilégier notre aspiration de vie qui nous pousse à être transparent et authentique d’une part, et nos mécanismes de survie qui nous amène à nous protéger, à mettre des masques, à nous aligner sur les autres d’autre part. Ainsi, ne plus être sous l’emprise de manipulateurs, c’est une aventure avec soi-même, c’est guérir de ses blessures, se libérer de ses peurs, conditionnements et mécanismes de protections, c’est arrêter d'offrir des prises à la manipulation.

Pour aller plus loin, lire Lâcher prise, comment se reconnecter à soi-même, aux éditions Robert-Laffont. Commander le livre sur Amazon ou bien cliquer ici

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Lâcher prise, comment se reconnecter à soi-même

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